Constatant que le calcul scientifique fait face à une période charnière et qu’il reste un domaine soumis à une évolution technologique rapide induisant une pression d’adaptation forte et continue, la direction de l’IN2P3 a souhaité discuter des défis futurs avec les acteurs reconnus de l’informatique à l’IN2P3 .
Cette discussion a pris la forme d’un colloque, réunissant une vingtaine de personnes ; l’objectif étant de dégager des lignes stratégiques à cinq ans afin de rester à la pointe et fournir à nos communautés les services nécessaires pour atteindre nos buts scientifiques.
Ces personnes ont discuté à l‘appui de courtes présentations des thèmes que vous pourrez retrouver dans l’agenda de cette réunion. Ces échanges, sereins et riches, ont fait l’objet d’une synthèse, également disponible en ligne. Nous en résumons ici les grandes lignes.
Le premier constat dressé est que les logiciels utilisés majoritairement dans nos disciplines sont constitués de modules séquentiels et mis en exécution à l’aide de techniques de parallélisme « embarrassant » basées sur la distribution des événements. Ce modèle tend à devenir obsolète et un rapprochement avec les communautés du calcul intensif devient indispensable pour penser la refonte de notre patrimoine logiciel. Ce rapprochement doit être soutenu par l’IN2P3, sous la forme d’actions à discuter notamment avec le réseau des informaticiens.
Concernant le traitement des grandes masses de données spécifiques à nos projets scientifiques, l’IN2P3 possède un savoir-faire incontestable. Le « Big Data », buzz-word du moment, ne doit pas occulter les enjeux liés aux problématiques d’accès aux données des futures usines à données que seront le HL_LHC et les expériences d’astro/cosmo. A cet égard, les thèmes de recherche des deux chercheurs en informatique de l’IN2P3 sont des voies prometteuses pour le traitement de ces données. La consolidation ou l’élargissement de leur activité à l’aide de recrutements apparaît comme une nécessité.
Ces activités aux frontières entre « Domain Scientists » et « Data Scientists » gagneraient à être renforcées par la mise en place de projets communs entre ces deux communautés de recherche auxquels le vivier de compétences des ingénieurs de l’Institut pourrait contribuer.
Concernant les infrastructures existantes, l’IN2P3 et l’Irfu ont développé une grande expertise dans les opérations de la grille avec un réseau T1/T2-LCG performant. Dans le contexte budgétaire actuel, il est important d’identifier des pistes d’optimisation des coûts d’exploitation de ces centres. La technologie innovante du Cloud est privilégiée par les investisseurs et les nouvelles communautés. Son usage n’est toutefois pas plus facile que la grille et un effort conjoint entre développeurs et administrateurs système et réseau doit être entrepris afin de fournir à nos utilisateurs des interfaces adaptées. Ce but peut être atteint en renforçant la synergie entre les sites T2-LCG et le CC.
Il est également reconnu que le RI3 à un rôle à jouer dans cette organisation, notamment en faveur de la professionnalisation du développement logiciel, en favorisant et suivant l’émergence de projets collaboratifs entre laboratoires. Il se doit également d’interagir avec le directeur du CC, le chargé de mission à l’informatique et le DAS chargé du calcul.
Sur le plan international, les discussions menées sont clairement en faveur de la création d’un comité de pilotage chargé d’analyser les opportunités et de définir la stratégie de participation de l’IN2P3 aux réponses aux appels à projets européens dans le domaine des e-infrastructures.
Enfin, il est rappelé que l’informatique de l’IN2P3, qui prend en compte les dimensions calcul et données et qui a montré qu’elle est transposable à d’autres communautés, est la seule en France qui soit pilotée par des besoins scientifiques. Paradoxalement, elle s’en trouve isolée auprès des décideurs. Elle doit ainsi jouer la carte de la complémentarité avec le monde du HPC et de la recherche en informatique.
Les participants à ce colloque émettent de ces constats les recommandations suivantes.
- Créer un comité de pilotage chargé d’analyser les opportunités et de définir la stratégie de participation de l’IN2P3 aux appels à projets européens ou nationaux
- Développer, en collaboration avec les autres instituts du CNRS et notamment l’INS2I, les synergies entre « Computer Scientists » et « Domain Scientists » en renforçant les équipes travaillant sur ces thématiques et en assurant leur reconnaissance
- Faire du défi du parallélisme et de la vectorisation des logiciels une priorité
- Garantir le positionnement de l’informatique de l’IN2P3 vis-à-vis des tutelles en nouant des relations avec le HPC et la recherche en informatique
- Encourager l’usage des plateformes et solutions communes afin de dégager des ressources dans le but de mettre en œuvre des applicatifs facilitant l’usage de nos infrastructures
- Promouvoir les initiatives internationales (HSF, RDA) auprès de nos communautés et collaborations
Catherine BISCARAT, David CHAMONT, Frédérique CHOLLET LE FLOUR, Pierre-Etienne MACCHI